Cour d'appel de Grenoble, Chambre secu fiva cdas, 6 janvier 2023, n° 21/00132

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. secu fiva cdas, 6 janv. 2023, n° 21/00132
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 21/00132
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire d'Annecy, 18 novembre 2020, N° 18/00346
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 13 janvier 2023
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Sur les parties

Texte intégral

C5

N° RG 21/00132

N° Portalis DBVM-V-B7F-KV7F

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La SAS MERMET & ASSOCIES

La CPAM DE HAUTE-SAVOIE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE – PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 06 JANVIER 2023

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d’une décision (N° RG 18/00346)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d’ANNECY

en date du 19 novembre 2020

suivant déclaration d’appel du 05 janvier 2021

APPELANT :

M. [G] [B]

né le 14 mars 1962 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Jérôme LUCE de la SAS MERMET & ASSOCIES, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEES :

Association Fondation [11], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 5]

représentée par Me Laurence JUNOD-FANGET de la SELARL ALYSTREE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Lidwine MEYNET, avocat au barreau de LYON

La CPAM de Haute-Savoie, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité

Service Contentieux

[Adresse 2]

[Localité 6]

comparante en la personne de Mme Caroline BLANCHARD DE LA BROSSE, régulièrement munie d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle DEFARGE, conseillère faisant fonction de président,

M. Pascal VERGUCHT, conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 03 novembre 2022

M. Pascal VERGUCHT, conseiller, en charge du rapport a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assisté de M. Fabien OEUVRAY, greffier, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 06 janvier 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 06 janvier 2023.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [G] [B], salarié de l’association Fondation [11] depuis le 02 avril 2013 affecté en qualité de moniteur-éducateur au sein du foyer Institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP) de [Localité 9] à [Localité 5], spécialisé dans l’accueil et le suivi des enfants, adolescents et jeunes adultes présentant des difficultés psychologiques, travaillait dans l’unité de vie « Paloma » de ce foyer lorsqu’il a été victime d’un accident du travail le 30 mai 2017 qui a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Savoie et a donné lieu le 12 avril 2019, à l’attribution d’un taux d’incapacité permanente de 17 % (dont 7 % de taux professionnel) pour les séquelles algiques et fonctionnelles d’un traumatisme de l’épaule droite et d’un traumatisme crânien chez un assuré droitier, éducateur spécialisé, à type de limitation douloureuse légère de la mobilité de l’épaule droite.

Après échec de la procédure de conciliation M. [B] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur la Fondation [11] et ce tribunal a par jugement du 19 novembre 2020 :

— déclaré le jugement commun à la CPAM de Haute-Savoie,

— débouté M. [B] de sa demande,

— l’a condamné aux dépens.

Par déclaration du 05 janvier 2021, M. [B] a relevé appel de cette décision et au terme de ses conclusions déposées le 03 octobre 2022 et reprises oralement à l’audience, il demande à la cour :

— de réformer le jugement ,

— de dire que l’accident du travail dont il a été victime le 30 mai 2017 est dû à la faute inexcusable de son employeur l’association Fondation [11],

— de dire que la rente qui lui a été attribuée doit être majorée à son maximum,

— de condamner la CPAM de la Haute-Savoie à lui verser une provision de 5 000 euros à valoir sur ses différents préjudices,

— de dire que les sommes dont la CPAM de Haute-Savoie sera tenue de faire l’avance lui seront remboursées par l’association Fondation [11],

— avant dire droit, d’ordonner une expertise médicale aux frais avancés de la CPAM,

— de condamner l’association Fondation [11] à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— de débouter l’intimée de ses demandes,

— de condamner l’association Fondation [11] aux dépens.

Par conclusions déposées le 18 octobre 2022 et reprises oralement à l’audience la Fondation [11] demande à la cour :

— de confirmer le jugement

subsidiairement,

* de statuer ce que de droit sur la demande de majoration de la rente,

* de constater qu’elle formule des réserves tant sur la demande d’expertise médicale que sur les faits allégués et l’ensemble des postes de préjudices allégués,

* de juger que ces préjudices ne pourront être évalués que dans le cadre d’une expertise portant uniquement sur les frais de logement et de véhicule adapté et les souffrances endurées,

* de débouter M. [B] de sa demande de provision ou à tout le moins de la réduire à de plus justes proportions,

* de juger que la CPAM fera l’avance des honoraires d’expert et de la provision le cas échéant,

en tout état de cause,

* de débouter M. [B] de sa demande d’exécution provisoire,

* de le débouter de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ou à tout le moins la réduire à de plus justes proportions,

* de condamner M. [B] à 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par courrier déposé le 24 octobre 2022 et repris oralement, la CPAM de Haute-Savoie demande':

— qu’il soit constaté qu’elle s’en remet à l’appréciation de la cour sur l’existence d’une faute inexcusable,

— en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable, la condamnation de l’employeur à lui rembourser les différentes sommes qu’elle aura versées à ce titre ainsi que les frais d’expertise.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est donc expressément référé aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIVATION

1. – L’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale prévoit que lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime a droit à une indemnisation complémentaire.

L’employeur est en effet tenu envers son salarié d’une obligation de sécurité auquel le manquement a le caractère d’une faute inexcusable lorsqu’il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

2. – M. [B] soutient qu’une décision administrative, en l’occurrence une décision de l’inspection du travail du 17 novembre 2017 autorisant son licenciement à la suite d’une enquête contradictoire non contestée par l’employeur, et un arrêt définitif de la chambre sociale de la cour d’appel de Chambéry du 24 novembre 2020, confirment l’existence d’une telle faute.

Il fait valoir qu’en avril 2014 puis le 1er décembre 2015, en qualité de délégué du personnel, il avait exercé son droit d’alerte suite à des agressions physiques commises par des mineurs sur des éducateurs ; que le CHSCT avait mené une enquête suivie le 08 janvier 2016 d’un rapport préconisant d’éviter l’isolement d’un professionnel avec un groupe de jeunes et le travail en binôme, préconisations non suivies par la direction de l’association, ce rapport n’ayant été discuté en réunion extraordinaire que le 14 mai 2017 après son agression.

Il soutient qu’il a été agressé et battu par un mineur dangereux, alors qu’il était seul, une agente d’entretien, qui ne devait pas s’occuper des jeunes, ayant quitté l’établissement après avoir terminé ses tâches ; que seul un autre jeune était présent, qui a alerté les secours.

Il ajoute que le planning dont se prévaut l’employeur est illisible et insiste sur le fait qu’il était bien le seul adulte présent lors de son agression par M. [F] [K], connu comme bagarreur, qui s’est vu notifier par la suite un rappel à la loi en tant qu’auteur des violences.

Il se prévaut en outre de divers témoignages sur les suites de l’agression, conteste tout fait fautif personnel, en soulignant qu’il n’a pas été pénalement poursuivi et ajoute que la faute que son employeur lui impute n’exonèrerait pas ce dernier de sa responsabilité.

M. [B] excipe de l’absence de formation suffisante, seule une formation en 2015 sur la gestion de la violence physique lui ayant été dispensée, et il reproche à son employeur l’absence de document unique d’évaluation des risques.

3. – L’association Fondation [11] soutient pour sa part que son salarié a bénéficié d’une formation en gestion de la violence physique pendant quatre jours en juin 2015, et disposait de moyens matériels en cas d’incident (téléphone portable, signal d’alarme, fiche de liaison').

Elle se prévaut de mesures de protection individualisées dans l’accueil des jeunes présentant des difficultés psychologiques et psychiatriques, du fait qu’elle emploie du personnel qualifié et met en place des procédures internes d’accompagnement et de prise en charge.

En ce qui concerne le mineur en cause, elle expose qu’il était connu pour des problèmes de concentration et des débordements, des attitudes inquiétantes et une instabilité prononcée, et bénéficiait d’un projet d’accompagnement individualisé et solide, pour en conclure qu’elle ne saurait se voir reprocher l’absence de mesures de protection face à la prétendue dangerosité de celui-ci, qui n’avait jamais été dénoncée.

L’association souligne également qu’il existe un registre de déclaration des événements indésirables et qu’elle n’a pas été destinataire d’une alerte contrairement à ce que soutient le salarié ; que M. [B] n’a pas été agressé le 29 novembre 2016, la déclaration d’accident du travail mentionnant qu’il a été blessé à la main gauche en essayant de contenir un jeune qui tentait de balancer une chaise sur une table, et que c’est la chaise qui a heurté la main de celui-ci ; que la CPAM a refusé la prise en charge d’un accident du travail ; qu’aucun manquement aux règles de sécurité n’a été pointé par le CHSCT à l’issue d’une enquête en 2016 et qu’enfin l’ARS aurait confirmé le 19 avril 2017 l’absence de manquement de l’employeur.

Elle ajoute sur les circonstances de survenance des faits que M. [B] n’était pas seul, puisqu’un planning prouve la présence de trois salariés dont Mme [E] qui avait le déjeuner en charge, qu’il y a une divergence entre ses déclarations et celles du jeune [F] qui a déclaré que tout a commencé parce que le moniteur lui a jeté une chaise dessus, ce que confirme un témoin également entendu par l’association, M. [W] [U], et que le comportement de la victime n’était donc pas en adéquation avec les règles de sécurité. Elle se prévaut également d’un précédent manquement de M. [B] aux règles de sécurité alors qu’il n’avait pas à une autre occasion enclenché une alarme incendie.

Enfin, sur l’autorité alléguée des décisions administrative et judiciaire, elle rappelle que l’inspecteur du travail intervenu pour le licenciement de M. [B], salarié protégé avait pour mission de contrôler la matérialité de l’inaptitude sans pouvoir affirmer de manquement de l’employeur, et elle soutient que si la chambre sociale de la cour d’appel a retenu un manquement de sa part à son obligation de sécurité, cela n’implique pas la reconnaissance d’une faute inexcusable qu’il appartient à M. [B] de prouver, ce qu’il ne fait pas.

4. – Il résulte des pièces versées au débat :

— que M. [B] était seul avec les jeunes [F] et [W], ce qui découle non seulement de la fiche de signalement d’incident qu’il a rédigéé mais aussi des entretiens de clarification avec les deux jeunes ;

— selon les attestations conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile de Mmes [O] [Y], [S] [I], [N] [A] et de M. [T] [V], qu’il a déclaré juste après les faits avoir été victime d’une agression physique et verbale de la part d’un jeune, portait des traces de coup et était dans un état de colère et de stress

— selon le projet individualisé d’accompagnement du jeune [F], né le 13 janvier 2002, que celui-ci était très bagarreur, comptait sur les éducateurs pour l’empêcher de frapper les personnes qui l’entouraient

— selon une fiche interne que M. [B] a exercé don droit d’alerte, en qualité de représentant syndical, à la suite d’agressions par des enfants de l’établissement, en avril 2014 ;

— que par courriel du 1er décembre 2015, il a alerté la direction de l’association sur la défectuosité des systèmes de protection des salariés et usagers, une éducatrice remplaçante ayant été victime d’une agression physique d’un jeune entraînant un arrêt de travail ;

— qu’un document du CHSCT fait état d’une visite de l’ITEP de [Localité 9] le 08 janvier 2016 à la suite de demandes répétées des délégués du personnel, de l’audition de salariés et d’échanges avec les élus et la direction notamment, qui ont permis de repérer chez certains professionnels et en particulier ceux travaillant en internat, des difficultés et des incidents répétés révélant un risque physique et psychosocial grave, un rapport ayant été écrit le 07 juin 2016 et une discussion avec l’employeur ayant eu lieu le 14 mai 2017 (soit deux semaines avant l’agression du 30 mai suivant);

— que ce rapport établi à la suite de cette visite d’inspection, en lien avec les alertes sur une recrudescence de la violence des jeunes depuis trois ans et des réponses jugées peu efficaces voire inadaptées de la direction, mentionne qu’il serait judicieux de mettre en place un protocole connu de tous pour éviter l’isolement d’un professionnel avec un groupe de jeunes et pour travailler en binôme ;

— que selon la déclaration d’accident du travail du 29 novembre 2016 M. [B] fait état d’une lésion à la main lors d’une tentative de contenir un jeune, et que cette lésion est confirmée par un courrier du même jour de l’infirmière de l’établissement ayant constaté la lésion de la main gonflée et douloureuse suite à une altercation avec un jeune ;

— que la fiche d’incident remplie par l’éducateur décrit une tentative de maîtrise d’un jeune devenu violent,

— qu’un courriel d’un responsable du pôle Autonomie de l’ARS, en date du 20 avril 2017, note que, à la suite d’un « cri d’alarme » anonyme sur les conditions de travail sur le site de l’ITEP [Localité 9], les faits dénoncés ne sont pas suffisamment établis, ils sont formellement contestés par la direction, mais il est écrit également que l’état des locaux est préoccupant, de plus en plus inadapté, et que sans doute ce cadre renforce la manifestation de certains troubles du comportement de jeunes, le déménagement de l’ensemble des unités devant être priorisé,

— enfin, que la lettre de l’inspection du travail du 17 novembre 2017 ayant autorisé le licenciement de M. [B] énonce que son inaptitude est liée aux conditions de travail de l’ITEP [Localité 9] reconnues comme très difficiles par les représentants du personnel ayant alerté la direction depuis 2015 des agressions multiples dont ont été victimes les salariés, ce que ne conteste pas la direction d'[11] lors de l’enquête contradictoire ; que M. [B] a subi deux agressions par des jeunes en l’espace de six mois, ce qui a eu pour conséquence une détérioration de sa santé et un arrêt de travail pour accident du travail ; que le comité d’entreprise qui a consulté le projet de licenciement a émis un avis défavorable à l’unanimité en déplorant qu’un salarié puisse se retrouver dans un tel état du fait de son activité professionnelle et que l’établissement connaît des problèmes récurrents, une enquête du CHSCT ayant été diligentée.

5. – Il résulte de tous ces éléments que l’employeur avait connaissance du danger auxquels ses salariés parmi lesquels M. [B] étaient exposés, à savoir le risque de violences exercées par les jeunes du foyer sur les éducateurs, et spécialement par le jeune [F] [K] dont c’est à tort qu’elle allègue que sa prétendue dangerosité n’aurait jamais été dénoncée, d’autant qu’elle reconnaît elle-même par écrit et à l’audience son instabilité et ses difficultés de comportement.

6. – Sur l’absence de mesures de préservation suffisant, M. [B] allègue le caractère insuffsant sa sa formation et, alors qu’il a été engagé en avril 2013, l’employeur ne justifie qu’une seule formation sur quatre jours en juin 2015, soit plus de deux ans après son embauche et deux ans avant l’accident du 30 mai 2017, alors que la confrontation à des comportements difficiles était permanente au sein de l’ITEP.

L’employeur ne justifie pas non plus de l’élaboration du document unique d’évaluation des risques ni des mesures mises en 'uvre à la suite de l’intervention du CHSCT ou des alertes de ses salariés et délégués du personnel.

Les mesures de prévention qu’il évoque (téléphone portable, signal d’alarme, fiche de liaison', mesures d’accompagnement et de protection des jeunes, registre…) ne sont pas suffisantes à cet égard et certaines ne sont d’ailleurs pas avérées en pratique.

Par ailleurs, le travail en binôme des éducateurs préconisé à plusieurs reprises n’a pas été organisé. Le planning de semaine produit est illisible, il ne justifie pas de la présence de trois ni de deux adultes le jour de l’accident.

En outre la chambre sociale de la présente cour, par arrêts des 12 septembre 2019 (rendu par défaut), puis 24 novembre 2020 (sur opposition de la Fondation [11]), a noté que l’employeur a laissé son salarié intervenir seul face à des jeunes capables de comportements extrêmement violents alors que de telles situations nécessitaient la présence de deux éducateurs et non d’un seul afin de prévenir les risques d’agression et de permettre une intervention rapide si nécessaire. Elle a relevé que le CHSCT avait régulièrement interpellé l’employeur et formulé des propositions auxquelles il n’a pas été donné suite, pour en déduire que la Fondation [11] avait manqué à son obligation de sécurité de résultat, que le licenciement pour inaptitude de M. [B] du 20 novembre 2017 étant sans cause réelle et sérieuse.

Enfin, la qualification de la faute inexcusable est exclusivement subordonnée au comportement de l’employeur, toute incidence d’une faute éventuelle du salarié étant écartée à ce niveau et réservée le cas échéant à l’appréciation du coefficient de majoration de la rente.

Etant établi que la Fondation [11] avait conscience du danger auquel était exposé M. [B] le 30 mai 2017 et qu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver, le jugement sera donc infirmé en son intégralité et la faute inexcusable de l’employeur reconnue à l’origine de l’accident du travail de M. [B] du 30 mai 2017.

7. – M. [B] demande la majoration au maximum de sa rente et il sera fait droit à sa prétention, en l’absence de contestation sur ce point.

Une expertise médicale sera ordonnée, aux frais avancés de la CPAM en application des dispositions du code de la sécurité sociale.

Le barème dit Dintilhac invoqué par l’appelant est inapplicable à l’indemnisation des préjudices découlant d’une faute inexcusable sur le fondement des dispositions du code de la sécurité sociale, et la mission sera ordonnée comme mentionné au dispositif.

La demande de provision est justifiée au regard des pièces médicales versées au débat à hauteur de la somme de 2 000 euros qui sera versée par la CPAM à M. [B].

La caisse pourra obtenir le remboursement des sommes dont elle fera l’avance dans les conditions légales.

En l’état, l’équité et la situation des parties justifient que M. [B] ne conserve pas l’intégralité des frais exposés pour faire valoir ses droits et la Fondation [11] sera condamnée à lui payer une indemnité de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi':

Infirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy du 19 novembre 2020,

Et statuant à nouveau,

Dit que l’association Fondation [11] a commis une faute inexcusable à l’origine de l’accident du travail dont M. [G] [B] a été victime le 30 mai 2017,

Fixe au maximum la majoration de la rente servie à M. [G] [B] au titre de cet accident du travail,

Alloue à M. [G] [B] une provision de 2 000 euros à valoir sur l’indemnisation des préjudices personnels, avancée par la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Savoie qui en récupérera le coût auprès de l’association Fondation [11] dans les conditions légales,

Ordonne avant dire droit sur la réparation de ses préjudices personnels une expertise médicale de M. [G] [B] aux frais avancés de la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Savoie qui en récupérera le coût auprès de l’association Fondation [11] dans les conditions légales,

Commet pour y procéder le docteur [D] [R] – Centre hospitalier [8] – M. [R] [Adresse 1]

avec mission’de :

— aviser les parties de la date et du lieu de l’expertise et les convoquer auxdites opérations,

— se faire communiquer par tout tiers détenteur, l’ensemble des documents nécessaires à l’exécution de la présente mission, en particulier, et avec l’accord de la victime le dossier médical complet (certificat médical initial descriptif certificat de consolidation, bulletin de présence à l’hôpital, compte-rendu d’intervention, résultat des examens complémentaires, etc.) et les documents relatifs à l’état antérieur (anomalies congénitales, maladies ou séquelles d’accidents) sous réserve de nous en référer en cas de difficulté,

— relater les constatations médicales faites à l’occasion ou à la suite de l’accident et consignées dans les documents ci-dessus visés,

— examiner M. [G] [B],

— décrire les lésions subies ou imputées par lui à l’accident du 30 mai 2017, leur évolution, les traitements appliqués, noter, en les mentionnant comme telles, les doléances de la victime, en précisant ses conditions habituelles d’existence et son état de santé antérieur, décrire les constatations faites à l’examen (y compris état général, taille et poids) en précisant les séquelles apparentes telles qu’amputations, déformations et cicatrices,

— donner un avis sur l’importance des souffrances physiques et morales endurées en fonction d’une échelle de 7 degrés, ceci en tenant compte des douleurs postérieures à la consolidation, mais n’entraînant pas d’atteinte à l’intégrité psychophysiologique,

— qualifier selon une échelle allant de 1 à 7, le préjudice esthétique même temporaire découlant des cicatrices, déformations, attitudes ou gestes disgracieux, conséquence des blessures subies, ceci sans tenir compte de la personnalité de la victime, préciser si ces séquelles esthétiques sont susceptibles d’être améliorées ou supprimées par la mise en oeuvre d’une thérapeutique, fournir, le cas échéant, tous documents photographiques qui devront être datés et commentés,

— donner un avis détaillé sur la difficulté ou l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer les sports ou activités spécifiques de loisir auxquels il serait avéré qu’elle s’adonnât régulièrement, plus généralement, donner un avis sur le préjudice d’agrément subi,

— dire si la victime peut reprendre ou non son emploi antérieur, ou un autre emploi et si elle subit ou non un préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, du déficit fonctionnel temporaire, non couvert par les indemnités journalières qui se rapportent exclusivement à la perte de salaire, des dépenses liées à la réduction de l’autonomie, y compris les frais de logement ou de véhicule adapté, à l’exception de l’assistance d’une tierce personne après consolidation, du préjudice sexuel, indépendamment du préjudice d’agrément,

Dit que l’expert':

— aura la faculté de s’adjoindre tout spécialiste de son choix dans une spécialité différente de la sienne, à charge de joindre leur avis au rapport,

— devra, au terme des opérations d’expertise, mettre en mesure les parties en temps utile de faire valoir leurs observations qui seront annexées au rapport et y répondre,

— tiendra le magistrat chargé du contrôle de l’expertise informé de l’avancement de ses opérations et le saisira de toute difficulté y afférente,

— dressera rapport de ses opérations pour être déposé au greffe de la cour dans un délai de SIX mois après sa saisine, en deux originaux et après en avoir adressé un exemplaire à chacune des parties en cause,

Dit qu’en cas d’empêchement, l’expert sera remplacé par simple ordonnance du magistrat chargé du contrôle des expertises,

Dit que l’affaire reprendra à l’initiative de la partie la plus diligente après le dépôt du rapport d’expertise, devant le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy.

Condamne l’association Fondation [11] aux dépens

Condamne l’association Fondation [11] à verser à M. [G] [B] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Isabelle Defarge, conseillère faisant fonction de présidente et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier La conseillère

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